En cas de Brexit, quelles seraient les conséquences pour le monde de la gestion d'actifs notamment en matière de passeport européen ? Nous avons enquêté.
Pour faire simple, aujourd'hui le passeport européen permet à une société de gestion, ayant obtenu un agrément par l'autorité de son pays d'origine, d'exercer ses activités dans toute I'Union européenne ou dans un Etat qui fait partie de l'Espace économique européen (EEE). Ainsi, lorsqu'une société de gestion française souhaite fournir ses services dans l'Union européenne ou dans un autre Etat de I'EEE, on parle de « passeport out ». A l'inverse, pour une société de gestion d'un autre Etat membre souhaitant fournir ses services en France, on parle de « passeport in ».
Reste à savoir si ces deux types de passeport fonctionneront toujours en cas de sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne, à la fois pour les sociétés françaises travaillant outre-Manche mais aussi pour les compagnies anglaises commercialisant leurs produits dans l'Hexagone. Contactée par Gestion de Fortune, l'Association Française de la Gestion Financière (AFG) n'a pas été en mesure de fournir une réponse à cette question.
Même son de cloche à I'AMF qui est en charge de la demande des passeports européens pour la France.
Pourtant, à quelques semaines du référendum, es risques de sortie du Royaume-Uni de I'Union européenne sont loin d'être faibles. Il faut dire que ce scénario, inimaginable il y a encore quelques mois, semble de plus en plus probab e. En effet, d'après les derniers sondages, les pros et les anti-Brexit seraient actuellement au coude à coude outre-Manche.
Même si pour l'heure, es sociétés de gestion françaises y voient un risque évident, elles ne semblent pas forcément mesurer tous les tenants et aboutissants de cet éventuel saut dans l'inconnu. Ainsi, pour Frédéric Bompaire, responsable des affaires publiques chez Amund, « le Brexit est un chemin non balisé qui traverse une terre inexplorée, la seule cer- titude, c'est qu'il faudra attendre une période de transition de deux ans avant d'y voir clair…
Trois questions à Pascal Koenig, associé responsable du secteur Asset Management chez Deloitte
Quelles seraient les conséquences d'un Brexit ?
Pascal Koenig : Si le Royaume-Uni décide de quitter l'Union européenne il deviendra de facto un pays tiers
En l'état actuel de la réglementation, les sociétés de gestion britanniques perdraient leurs passeports européens et ne seraient donc plus à même de commercialiser ou de gérer leurs produits en Europe continentale via le passeport. De a même façon, leurs concurrentes françaises ne pourraient plus travailler en Angleterre.
Comment imaginez-vous la suite ?
PK : Une période transitoire de deux ans est normalement prévue dans un tel cas de figure, même si pendant cette période, des « astuces » restent possibles pour les acteurs britanniques, notamment s'ils disposent de structures implantées au Luxembourg ou en Irlande par exemple. Toutefois le manque de substance de ces entités tout particulièrement en compétence de gestion, constitue une anomalie dans un environnement qui se veut un level playing field.
Voyez-vous néanmoins des opportunités pour la France en cas de Brexit ?
PK : Oui clairement si la France sait saisir cette opportunité. En effet, l'Hexagone ne dispose pas uniquement d'inconvénients fiscaux mais peut clairement s’appuyer sur un écosystème, des talents et une capacité d’innovations a même de séduire les grands acteurs de la gestion d'actifs anglo-saxons. Sachant que les firmes implantées à Londres pèsent considérablement dans la distribution continentale ; il serait plus que pertinent de leur dérouler le tapis rouge, comme le proposait David Cameron, entrepreneurs français au moment de l'instauration de la taxe 75% en 2012.
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