Ils ont parfois des pathologies musculaires ou articulaires. Pourtant, prendre conscience des mauvaises postures peut éviter bien des problèmes.
Peu de musiciens de haut niveau échappent aux pathologies provoquées par leur art. Le pianiste Leon Fleisher a ainsi perdu l'usage de sa main droite durant plusieurs années. Louis Armstrong a donné son surnom à une maladie, le "syndrome de Satchmo", qui décrit une rupture du muscle des lèvres, comparable au claquage des sportifs.
Souvent, il s'agit de problèmes musculaires ou articulaires, comme les tendinites, ou de pathologies de surmenage (troubles musculo-squelettiques) qui touchent en particulier les femmes. On rencontre plus rarement la dystonie de fonction, le mal dont fut atteint Léon Fleisher. « On estime que 80 % des musiciens d'orchestre sont affectés par au moins une de ces pathologies », précise Philippe Camagne, kinésithérapeute, spécialisé dans le traitement des musiciens.
Le musicien ne prend pas toujours assez soin de lui
Pour le Dr Andrée Darcier, président de l'association Médecine des Arts, « la dystonie est un vrai fléau pour les musiciens.
Se manifestant par d'intenses contractions musculaires involontaires, elle leur fait perdre le contrôle de leurs gestes et peut ruiner une carrière. »
La raison principale en est que le musicien s'occupe de sa main, de son avant-bras et de sa musique, mais pas du reste du corps.
« La grande majorité des douleurs des musiciens provient d'une mauvaise utilisation du corps, explique Vincent Travers, chirurgien orthopédique à Lyon et président de l'association Bio-Amadeus. Souvent, le musicien d'orchestre se tient mal, mange mal, ne fait pas de sport... » Ainsi, quand un trompettiste adopte une mauvaise position, l'air expulsé passe moins facilement et il doit souffler plus fort, au risque de s'endommager les lèvres.
C'est pourquoi, même si des interventions chirurgicales sont parfois nécessaires (syndrome du canal carpien, lystes synoviaux...), elles restent rares, et les thérapies mises en place consistent plutôt à faire prendre conscience de son corps, inciter à une meilleure hygiène de vie, ou a reprogrammer" les postures.
« Notre objectif consiste à leur faire utiliser leur corps autrement et le mettre mieux à disposition de leur technique. Tous nos patients disent qu'ils ont senti des progrès », assure Philippe Chamagne.
Jouer face à un miroir
Un pianiste qui a tendance à se tenir courbé remontera ses épaules pour mettre ses mains à la hauteur du clavier. Cette position peut générer des tensions dans les mains et les avant-bras. Le thérapeute lui fait prendre conscience de sa mauvaise posture en le faisant jouer devant un miroir.
Il lui donne des exercices visant à tonifier les muscles du dos et la ceinture abdominale pour qu'il puisse se tenir droit face à son instrument. Enfin, le thérapeute va l'aider à repositionner ses mains sur le clavier. Si la posture du jeu change, sa façon de jouer, elle, ne change pas. Qui a dit que les artistes devaient souffrir pour être bons ?