Comment empêcher les patrons de recourir massivement aux contrats courts ? Cette interrogation est au fait depuis de nombreuses années. La loi de sécurisation de l'emploi datant de 2013, avait déjà installé une sur-taxation des contrats courts envers les cotisations chômage patronales.
La taxation actuelle est inefficace
Elles sont passées ainsi de quatre à sept pourcent pour les CDD à un mois ou moins, de quatre à 5,5 pourcent pour les contrats à durée déterminée entre 1 et 3 mois et de quatre % à 4,5 pourcent pour les contrats d'usage datant de moins de 3 mois.
Problème, le champ d'application effectif de la mesure s'est réduit comme peau de chagrin lors des discussions entre partenaires sociaux. En échange de la création d'un CDI intérimaire, l'intérim a échappé à cette surtaxation (on compte pourtant quelque 580 000 intérimaires en 2016, contre 250 000 en 1990). Sont exemptés aussi les CDD de remplacement et les CDD saisonniers. Seuls les CDD pour surcroît d'activité et les contrats d'usage sont finalement concernés. Mais ces derniers, très souples, restent attractifs pour les entreprises. Spécifiques à certains secteurs (hôtellerie-restauration, déménagement, spectacles, sport professionnel...), ils ne prévoient en effet ni primes de fin de contrat, ni limite de renouvellement, ni délais de carence.
Du fait de ces exemptions, cette surtaxation a douché les espoirs de recettes supplémentaires estimées en 2013 à 200 millions d'euros. Elle n'a généré finalement que 70,4 millions d'euros de rentrées en 2014. Quand les exonérations accordées en contrepartie aux employeurs pour les embauches de salariés de moins de 26 ans se sont élevées elles à 74,2 millions d'euros, pointe l'Unédic.
Du coup, alors que les CDI rapportent 28,9 milliards d'euros de cotisations pour 18,5 milliards d'indemnités versées, soit un excédent de 10,4 milliards, l'ensemble des contrats courts (CDD, intérim, intermittents du spectacle) affichent, eux, un déficit de 8,7 milliards d'euros pour l'Unédic. 45 % des allocataires indemnisés pointent au chômage après une mission d'intérim ou un CDD. Et 73 % de ces allocataires ont moins de 26 ans.
Cette surtaxation est aussi loin d'avoir freiné le recours massif aux contrats courts. Selon l'Acoss, l'organisme qui collecte les cotisations sociales, les CDD représentaient 87 % des embauches au premier trimestre 2016 (contre 76 % en 2000), et 69 % sont des contrats de moins d'un mois.
C'est d'ailleurs le raccourcissement de la durée des contrats — cette précarisation de la précarité — qui explique l'essor de la part des CDD dans les embauches, alors que leur part dans l'emploi total reste stable
depuis vingt-cinq ans, de l'ordre de 8,4 % selon l'Insee. Quant à la part de réembauche chez le même employeur, elle est passée de 30 % à 59 % du total des embauches entre 1995 et 2012 121.
Parmi elles, la proportion de recrutement par le dernier employeur, sans que le salarié ait travaillé ailleurs, s'élevait à 80 % en 2012. Avec une
durée médiane entre deux contrats de six jours.
L'entrée en vigueur du système des droits rechargeables à l'assurance chômage en 2014 a encore accru l'incitation à l'usage des contrats très courts par les employeurs, dans la mesure où l'acceptation d'un tel contrat n'amputait plus les droits à indemnisation des chômeurs.
FAUT-IL ALOURDIR LA SURTAXATION ?
Pour calmer la contestation des jeunes contre le projet de loi El Khomri, le Premier ministre avait promis, en avril dernier, d'introduire dans le texte une modulation obligatoire des cotisations chômage afin de lutter contre les CDD courts. Libre ensuite aux partenaires sociaux d'en fixer le montant. Mais face aux menaces du Medef de quitter les négociations de la nouvelle convention de l'assurance chômage en cours actuellement, Manuel Valls y a renoncé. C'est donc désormais aux négociateurs syndicaux d'imposer leurs vues au camp patronal, vent debout contre une surtaxation des contrats courts, jugée nuisible à l'emploi.
La CFDT est favorable à une cotisation universelle dégressive, selon un modèle établi par l'économiste Bruno Coquet : plus l'ancienneté des personnes dans l'entreprise augmente, quelle que soit la nature du contrat, plus les cotisations chômage baissent.
« L'avantage serait d'éviter toute casuistique sur la délimitation des contrats de travail soumis à surcotisation », explique Jacques Freyssinet dans une note de Lasaire.
Pour sa part, FO plaide pour un modèle de bonus-malus inspiré de l'expérience rating américain. Un système défendu par les économistes
Franck Malherbet et François Fontaine ainsi que par Pierre Cahuc. Le taux de cotisation est modulé en fonction du solde entre les contributions payées par l'employeur et les allocations versées à ses anciens salariés sur une période donnée.
Autrement dit, plus l'entreprise a causé de dépenses d'indemnisation de salariés qu'elle a licenciés par le passé, plus ses cotisations augmentent. Mais doit-on vraiment pénaliser les industries des secteurs concurrencés par les pays à bas salaires, voire les sous-traitants pressurés par leurs donneurs d'ordre (qui, eux, ne licencient pas), se demande Jacques Freyssinet ?
La CGT, de son côté, entend surtout accroître la surtaxation des contrats courts en la portant à 8,4 % pour les contrats de deux à six mois, à 10,4 % pour un à deux mois, et jusqu'à 12,4 % pour moins d'un mois, hors CDD de remplacement. Autre mesure choc proposée, la taxation des ruptures conventionnelles des seniors, bien souvent assimilées à des préretraites déguisées, selon la CGT. En fonction de l'âge du salarié, qui lui ne serait pas pénalisé, de 8 % à 12 % du montant de la transaction seraient reversés à l'Unédic.
EXISTE-T-IL D'AUTRES SOLUTIONS ?
D'autres pistes sont aussi proposées pour limiter les contrats COUrtS. Le député socialiste Jean-Patrick Gille avait ainsi proposé d'insérer dans la loi travail Une sorte de taxe
Tobin: quelle que soit la raison du contrat ou sa nature, les employeurs paieraient une contribution forfaitaire de 10 à 15 euros sur toutes les fins de contrats. Ce qui coûterait donc plus cher à ceux qui abusent des contrats courts. Cette proposition est passée à la trappe lors du passage en force du gouvernement sur la loi travail avec le 49-3.
Faudrait-il aussi revoir les règles de l'activité réduite ? Instauré en 1983, ce système permet d'occuper un emploi court tout en touchant, sous certaines conditions, ses allocations chômage.
L'objectif de départ était d'éviter que les chômeurs restent éloignés du marché de l'emploi.
Les droits rechargeables créés lors de la dernière convention d'assurance chômage abondent dans le même sens. Aucun demandeur d'emploi ne doit redouter de perdre des droits à l'assurance chômage s'il accepte un emploi, même de courte durée. Si les études ne tranchent pas sur les effets - un tremplin vers l'emploi durable ou, à l'inverse, un enfermement dans la précarité -, l'activité réduite a créé une forme d'intermittence généralisée très prisée des entreprises. Les allocataires qui travaillent et sont indemnisés sont ainsi passés de 470 000 en 1995 à 670 000 en 2014, selon l'Unédic.
Comment résoudre le dilemme entre favoriser le retour à l'emploi et ne pas laisser s'installer une flexibilité excessive avec le concours de l'assurance chômage ? C'est la question sous-jacente de cette négociation épineuse. Si les partenaires sociaux ne parviennent pas à se mettre d'accord d'ici à juillet prochain, c'est le gouvernement qui reprendra la main.
Humour pour mettre tout le monde d’accord, soyons fou:
Puisque nous sommes dans une économie ultra-libérale où les forces de travail doivent être libérées pourquoi ne pas supprimer le CDI ?
Imaginons un monde où les patrons seraient en concurrence permanente pour recruter…
Libérons les employés supprimons le CDI..
Comme cela ce sera la jungle pour tout le monde, « un monde égalitaire » ou Medef et ouvriers seraient obligés de batailler quotidiennement pour ne pas crever…
La jungle quoi….. que le ou les meilleurs gagnent.